J’écris présentement Des copains partout, un recueil de poèmes pour les jeunes. Je peux me consacrer à ce recueil grâce à une bourse de création, catégorie A. du Conseil des arts du Nouveau-Brunswick. Je suis une écrivaine choyée car j’ai obtenu de nombreuses bourses de création tant du Conseil des arts du Canada que du Conseil des arts du Nouveau-Brunswick. Pourtant, pour beaucoup de mes collègues, obtenir une bourse semble impossible ou relever de la magie. À chaque demande que je fais, bien sûr, je passe des heures à réfléchir pour cerner mon projet et le rédiger. Je doute de tout. Quand je reçois une réponse positive, je suis toujours étonnée. J’en ai eu des négatives aussi. Plusieurs négatives.

Pour obtenir une bourse, au départ, il faut préparer et envoyer une demande. C’est l’évidence même. Pourtant, déjà à cette étape, plusieurs se disent que ça ne vaut pas la peine d’essayer, que c’est trop compétitif, qu’ils n’ont aucune chance. Pour ma part, je trouve que même si on n’obtient pas de bourse, le fait d’écrire le projet permet de préciser nos idées.

Après toutes ces réponses positives et négatives, j’ai tiré des conclusions. Je crois donc que j’augmente mes chances quand j’explique ce que ce projet a de nouveau pour moi et en quoi il me permettra d’avancer en arts. Quand je peux, je parle aussi de ce qu’il apportera de novateur dans le domaine. Voilà ce que j’avais mis pour Des copains partout : Je souhaite approfondir mon approche poétique par rapport à l’enfance. Ce sera la première fois que j’écrirai de la poésie pour cette tranche d’âge. Je compte aussi créer un recueil comportant un plus grand nombre de poèmes. Mes autres albums et recueils touchaient les plus jeunes et étaient plutôt courts. Tout simple, n’est-ce pas ?

Quand on prépare son dossier et son projet, il faut faciliter la lecture des pairs évaluateurs. Pour avoir fait partie de ces comités, je sais que le temps alloué à chaque dossier est court. Plus le projet est précis, écrit de manière sobre et efficace, que le curriculum vitae, la bibliographie et les exemples d’œuvres sont graphiquement clairs, plus les personnes qui lisent comprendront rapidement le propos et les enjeux du projet. Pas de fioritures ni de phrases tarabiscotées. Une demande bourrée de fautes donnent une bien mauvaise image d’un auteur.

Il faut aussi savoir que les budgets ne sont pas faramineux et qu’il y a beaucoup de demandes. Au Conseil des arts du Canada, les budgets sont divisés en fonction du pourcentage de demandes dans chaque genre littéraire, du moins, c’était comme ça quand j’avais siégé sur un comité en poésie. Cela veut dire que plus il y aura de demandes faites par des auteurs pour la jeunesse, plus il y aura un pourcentage du budget alloué à ce genre littéraire. Au Conseil des arts du Nouveau-Brunswick, toutes les disciplines artistiques sont jugés au même concours. Mon projet est donc comparé à ceux en arts visuels, en musique, en théâtre. Chaque discipline a cependant un comité de pairs.

Je demande des bourses depuis des années. Jamais je n’ai baissé les bras quand ça ne fonctionnait pas. J’ai analysé les raisons, j’ai réessayé. Je crois que la réussite réside aussi dans cette faculté de rebondir, de ne pas se laisser abattre. Et aussi de connaître les forces et les faiblesses de notre travail. Dans une demande, on met en lumière ses forces et on utilise ses faiblesses pour expliquer comment on va avancer.

Ne jamais lâcher, croire en soi.

Et se croiser les doigts.